Tobias Renggli auf dem bepackten Fahrrad, im Hintergrund ein Berg in der Abendsonne.

Vélo

Bikepacking en Europe: de capitale en capitale à vélo

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Portraitfoto von Torge
Torge
Auteur invité, 4-Seasons
© Fotos

Explorer et repousser les frontières du possible. En un peu plus de 200 jours, Tobias Renggli a traversé les capitales et les plus hauts sommets de (presque) tous les pays d’Europe à la force de ses jambes.

C’est à Lucerne, sur le Pilatus, que je rencontre ce jeune sportif hors du commun pour discuter voyage, aventure et motivation...

Tobias, comment vient-il à l’idée d’un jeune de 18 ans d’entreprendre un tel voyage?
(rires) C’était le bon moment pour moi et j’en avais envie. Je pense que les moments de pause dans la vie sont propices à l’aventure, du moins c’est le cas pour moi. Lorsque l’on visite la capitale et le plus haut sommet d’un pays, cela donne déjà beaucoup de choses à voir et une bonne idée du lieu.

Mais fallait-il vraiment que ça soit à vélo et à pied?
J’avais déjà un vélo et il s’agit selon moi d’un moyen de transport idéal. En vélo, on est assez rapide pour parcourir de longues distances et assez lent pour profiter intensément de la diversité des paysages. Pas de superflu, pas de bruit, on se retrouve immergé dans le vent et dans les bruits environnants. Et les hauts sommets n’ont plus qu’à être gravis à pied.

Ok, mais je ne pense quand même pas que tout le monde ait le courage de se lancer dans une telle aventure.
Tobi regarde au loin, comme s’il cherchait les bonnes paroles. Il semble mature pour son âge. Il choisit ses dires avec circonspection, on ressent que ses voyages l’ont marqué. Il fait des pauses, pèse chacun de ses mots et son regard suit le mouvement des nuages dans le ciel.

 Quand j’avais douze ans, un décès soudain dans mon entourage a bouleversé ma vie. Un événement aussi marquant laisse des traces. Cela m’a rendu très conscient d’une chose: la vie est courte. J’ai besoin de passions et de me dépasser, la routine ne m’intéresse pas. Je ne veux pas me dire plus tard: «Si seulement j’avais fait ça...». L’aventure a commencé pour moi à l’âge de 16 ans. Pour mon travail de maturité, j’ai visité les 250 villes qui composent la Suisse et j’ai gravi les plus hauts sommets de chaque canton. Ce projet était déjà similaire à celui que je viens de réaliser, juste à plus petite échelle, et il m’a donné soif de plus. Après la maturité, je me suis dit: «Hé, il y a encore plein de choses à faire!». J’ai pris le départ une semaine après la fin de mon service militaire.

  • Tobias Renggli auf eniem Grat beim Wandern.
    Photo © Torge Fahl
  • Kurvenreiche Strasse beim Malojapass, es liegt Schnee.

    Presque 1500 kilomètres sur 250’000 au total: le col de la Maloja.

    Photo © Torge Fahl
  • Tobias Renggli auf einem Grat bei Pilatus.

    L’entretien a été réalisé sur le Pilatus, la montagne d’où Tobias est originaire.

    Photo © Torge Fahl

Mais attends, ne faut-il pas se préparer longuement pour se lancer dans un voyage aussi monumental?
Selon moi, l’aventure commence vraiment lorsque l’on arrête de planifier les choses. De toute façon, pour un projet d’une telle envergure, tu ne peux guère prévoir plus que quelques jours en avance. J’ai juste préparé une liste de 44 pays avec, pour chacun, deux endroits à visiter: la capitale et le plus haut sommet, soit environ 90 objectifs. Cette liste m’a simplement servi de support, histoire de ne pas voyager sans but à travers l’Europe. En novembre, je me suis mis à pédaler vers le sud; tu connais la suite.

Quels bagages as-tu emportés?
Je n’ai pris que le strict nécessaire, c’est-à-dire mon vélo, un sac de couchage, un matelas de sol, des vêtements, un peu de matériel d’alpinisme et des bonnes chaussures de trail running. On ne peut réaliser ce genre de voyage qu’avec un équipement léger et minimaliste. Certaines personnes diront même que j’aurais dû laisser mon piolet à la maison, mais si c’était à refaire, je le reprendrais sans hésiter. Il est devenu un compagnon indispensable, que ce soit pour gravir les sommets ou pour faire peur aux chiens errants.

Même aujourd’hui, Tobias est habillé de manière minimaliste. Il ne porte que des chaussures de trail running, un short et une veste légère. Cela lui permet de se mouvoir avec flexibilité sur les sentiers. Il saisit son piolet avec aisance pour franchir les passages raides et enneigés. Après sept mois de voyage, son visage ne trahit aucune trace de fatigue et son niveau d’énergie semble intact.

À quoi ressemblait ton quotidien pendant ton voyage?
Pour résumer, je me levais, je pédalais, j’allais me coucher. Et de temps à autre, je gravissais un sommet ou je visitais une ville. (rires) Quand tu te lèves à cinq heures du matin, tu deviens capable de t’endormir à peu près partout. Je dormais dans mes vêtements et ma veste me servait de coussin. Comme ça, j’étais prêt à partir en dix minutes. Puis tu n’as plus qu’à pédaler toute la journée, en t’arrêtant ici et là pour prendre une photo ou pour faire le plein dans un supermarché. Je m’arrêtais de rouler vers minuit pour trouver un lieu pour dormir, sortir mon matelas de sol et me glisser dans mon sac de couchage. On dort plutôt bien sous les ponts et un arrêt de bus ressemble à s’y méprendre à une chambre d’hôtel.

Sacs de bikepacking

Ça me paraît épuisant. Combien de fois as-tu eu la sensation d’avoir atteint tes limites?
Je jouais avec les limites chaque jour. Mais certaines expériences m’ont marqué plus que d’autres: je me suis fait arrêter à la frontière avec la Biélorussie, un chien m’a mordu en Albanie et j’ai dû aller à l’hôpital, j’ai fait une intoxication alimentaire sévère en Turquie et, en Grèce, j’ai fait une telle insolation que je ne savais plus où j’étais ni qui j’étais. Et il y a aussi une histoire avec un trafiquant de drogues...

Pardon, un trafiquant de drogues?!
C’était au Monténégro. Un automobiliste m’a invité chez lui. Il habitait dans une cabane isolée dans la forêt. Quand j’y suis arrivé, lui et son frère se sont enivrés dans les règles de l’art. Il m’a ensuite montré son champ de cannabis et les diverses armes à feu qu’il cachait sous son canapé.

Tu n’as pas eu peur que quelque chose t’arrive?
Je ne me suis pas senti à l’aise sur le moment, mais tout s’est bien passé en fin de compte. Et il ne faut pas oublier qu’il peut t’arriver quelque chose partout. Surtout en ville et dans la rue, il suffit qu’un automobiliste ne te voie pas traverser. C’est pour ça que j’aime tant les montagnes. Elles ont aussi leur lot de dangers, mais c’est toi qui es responsable. Pour être franc, je pense que l’idée de sécurité absolue est une illusion.

Nous continuons notre randonnée: sa tignasse brune ondule d’avant en arrière, il marche d’un pas énergique et régulier le long de l’arête. Ni l’altitude ni la pente ne semblent le freiner. Tobias irradie d’énergie.

Porträtbild Tobias Renggli
Photo © Torge Fahl

Tobias Renggli (20 ans)

est originaire de Buchrain, à proximité de Lucerne. Il fait des études de sciences de la santé et de technologie à l’EPF de Zurich. Parallèlement, ce trail runner s’adonne volontiers à la compétition et donne des conférences sur son voyage à travers l’Europe.

tobiasrenggli.ch
@tobiasrenggli

N’as-tu pas pensé une seule fois à l’abandon pendant ces 204 jours d’aventures?
En Norvège, j’ai passé deux semaines sous la pluie, mes habits étaient trempés constamment. En Suède, j’ai lutté pendant 20 kilomètres à travers une tempête de neige pour gravir le Kebnekaise, tout ça pour devoir faire demi-tour peu avant le sommet en raison des mauvaises conditions. Au Halti, en Finlande, je me suis retrouvé dans un blizzard tel que je me suis complètement perdu. Heureusement, j’ai réussi à revenir sur mes pas, sinon je serais probablement encore en train de tourner en rond aujourd’hui... Mais il n’y a pas eu que des moments difficiles, j’ai aussi profité d’expériences incroyables et enrichissantes à bien des égards. Et je savais que j’allais revenir tôt ou tard chez moi, cette pensée me poussait à continuer!

Cette expérience du dépassement de soi et de la solitude t’a-t-elle changé?
Ce n’est pas vraiment à moi de juger de cela. Mais je suis sans doute devenu plus sûr de moi. J’ai aussi l’impression d’être devenu plus calme intérieurement, plus flexible et plus ouvert aux nouvelles expériences. Lorsque l’on reste si longtemps seul, on a le temps de penser à bien des choses et de méditer, même s’il y a toujours quelque chose à faire.

As-tu fait des rencontres intéressantes pendant ton voyage?
Quand un jeune pédale 35’000 kilomètres à travers l’Europe avec un piolet sur le dos, cela attise forcément la curiosité des gens. Au Portugal, quelqu’un m’a demandé avec étonnement ce que je faisais avec mon piolet au fin fond du sud de l’Europe, puis m’a aussitôt invité à lui rendre visite à Paris. En Grèce, sur le mont Olympe, j’ai fait la connaissance de Toni. À 65 ans, il n’avait encore jamais voyagé de sa vie. Pour réaliser son rêve, à savoir d’escalader une montagne, il a tout simplement vendu deux vaches puis a pris la route.

Est-ce qu’il y a des lieux qui te sont restés en mémoire plus que d’autres?
Bonne question. Londres, Paris et Lisbonne sont évidemment des métropoles impressionnantes, surtout lorsque l’on se rend dans le centre lentement, en passant par leurs banlieues. Cela permet d’appréhender la ville de manière crescendo, rien à voir avec un voyage en avion. J’ai des souvenirs particulièrement marquants d’endroits moins populaires et moins connus, notamment de Sarajevo, de Varsovie ou encore de l’Albanie et du Monténégro. Les gens là-bas ont un sens de l’accueil très développé et comme peu de touristes s’y rendent, les villes et les paysages ont préservé leur authenticité.

Quel a été le moment le plus marquant de ton voyage?
L’ascension du dernier sommet a été un moment très spécial. À l’origine, je voulais garder le mont Blanc pour la fin, mais les mauvaises conditions en été et le risque élevé d’éboulement ont mis un terme à mon projet. J’étais très frustré d’être arrivé si loin et ne pas pouvoir poser la dernière pièce de ce puzzle gigantesque. Finalement, j’ai opté pour le Grand Paradis, le plus haut sommet que l’Italie ne partage pas avec un autre pays. Son ascension n’est pas particulièrement difficile, de sorte que j’ai pu le gravir en solo. Cela faisait 204 jours que j’étais sorti de ma zone de confort, et initialement, je ne pensais pas être capable d’arriver au bout de ce projet. Quand je me suis retrouvé sur ce sommet et que les premiers rayons du soleil sont apparus, j’ai réalisé que j’avais réussi ce voyage malgré tous les défis et les doutes. C’était un sentiment vraiment gratifiant.

Qu’est-ce que tu ferais différemment lors d’un prochain voyage?
Je prendrais plus de temps. J’ai parcouru environ 200 kilomètres par jour. En moyenne, je n’ai passé que quatre jours dans chaque pays. Avec toutes ces expériences, ces lieux et ces rencontres, j’étais parfois complètement dépassé par les événements.

Comment racontes-tu ton voyage pendant tes conférences?
En plus de raconter de nombreuses anecdotes et de donner mes impressions, je fais participer le public à une heure d’échanges interactifs sur la culture de l’erreur, l’évaluation des risques, le dépassement de soi et la performance. J’ai appris beaucoup de choses pendant mon voyage et j’ai envie de les partager. Mais je veux offrir plus qu’un simple divertissement. J’aime échanger avec les autres, et en même temps, cela me permet de refaire le point sur mon voyage.

  • Zelt auf einem Berg in Glarus, man sieht verschneite Gipfel und einen See.

    La Norvège? Et non, cette photo a été prise à Glaris quelques semaines après la fin du projet.

    Photo © Tobias Renggli
  • Tobias Renggli steht mit seinem bepackten Fahrrad vor dem Eiffelturm in Paris.

    Passage à Paris.

    Photo © Tobias Renggli
  • Tobias Renggli auf dem Fahrrad, er fährt eine Passstrasse hoch.
    Photo © Daniel Schürch

Quels conseils donnerais-tu à une personne qui souhaite se lancer dans ce type de voyage?
La volonté doit être au rendez-vous. La motivation doit venir à 100% de toi. Autrement, je te conseillerais de ne pas planifier trop méticuleusement, car cela fait perdre au voyage son caractère aventureux. Ne te préoccupe pas trop de l’itinéraire, mais teste ton matériel. Après tout, ton échec ou ta réussite dépendra sans doute du bon fonctionnement de tes équipements. Un autre conseil plutôt spécifique: scier le manche de ta brosse à dents ne te fera pas aller beaucoup plus vite! (rires)

Quels sont tes prochains projets?
Pour le moment, j’ai troqué la selle de mon vélo contre un amphi. J’ai commencé des études à Zurich, mais ma soif de nouveauté n’est pas encore assouvie. J’ai aussi des comptes à régler avec le mont Blanc! Je ne sais pas encore ce que je vais faire exactement, mais je sens que je vais dans la bonne direction.

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