Ein Wasserflugszeig auf dem Wasser, jemand springt vom Flügel.

Loisirs

Entretien avec le photographe outdoor Chris Burkard

  • #Photographie
Julian Rohn
Auteur, 4-Seasons
© Fotos

Personne n’a autant marqué la photographie outdoor moderne au cours de la dernière décennie que Chris Burkard. Ce Californien de 36 ans a commencé en tant que photographe de surf, travaille désormais pour des géants comme Apple et consorts, et a un gros faible pour l’Islande.

Chris, tu comptes parmi les photographes outdoor les plus renommés, comment as-tu grandi et comment as-tu fait tes premiers pas dans la photographie?
J’ai grandi en Californie, près de Pismo Beach, directement sur la Highway 1 de la côte Pacifique. Le surf fait partie intégrante du quotidien dans cette région et je photographiais mes amis. Je ne poursuivais pas de grandes ambitions artistiques, je voyais simplement l’appareil photo comme un moyen de m’évader de Pismo et de découvrir le monde.

Comment cela a-t-il marché pour toi?
J’ai tout misé sur la seule carte de la photographie de surf. Pendant les six ou sept premières années de ma carrière, je n’ai photographié que ça. J’ai essayé beaucoup de choses, j’ai fait beaucoup d’erreurs et j’ai surtout énormément appris. Cela a fini par payer. Au bout d’un certain temps, je me suis constitué un réseau d’entreprises et de magazines qui m’ont fait voyager.

Qu’est-ce qui te différenciait des autres photographes de surf?
À la base, je voulais devenir photographe de paysage. Mais j’ai réalisé très tôt que je ne pourrais jamais payer mes factures en me cantonnant à ce style de photographie. J’ai malgré tout essayé d’intégrer cet aspect dans mon travail. Je considère toujours le paysage comme la composante la plus importante de l’image. Et si je pouvais intégrer un surfeur dans l’image, le surfeur n’était qu’un élément parmi d’autres. Les photos de surf classiques se concentraient alors beaucoup plus sur les athlètes et l’action proprement dite.

Aujourd’hui, tu es connu pour ce style: de petites personnes dans de grands paysages ...
Ce processus est venu naturellement. Si tu veux montrer plus de paysage, tu réduis la taille du sujet. Je suis tombé amoureux de ce style et c’est devenu un peu ma marque de fabrique. Ce qui est amusant, c’est que c’est devenu un style de photo populaire dans toute la scène de la photographie outdoor.

  • Fotograf Chris Burkard im Wasser.

    Même les jours de pluie, il est possible de faire des photos saisissantes: quelque part dans le Pacific Northwest en mission pour Prana.

    Photo © Chris Burkard
  • Grand Prismatic Spring in Montana von oben.

    Le Grand Prismatic Spring dans le Montana par un froid matin d’hiver depuis le hublot d’un petit Cessna.

    Photo © Chris Burkard
  • Aufnahme von den Aleuten, man sieht einen eingeschneiten Vulkan, im Vordergrund surft jemand.

    Pour cette photo, Burkard et son équipe ont attendu pendant des jours dans une cabane sur les îles Aléoutiennes, jusqu’à ce que le volcan émerge des nuages pendant quelques minutes.

    Photo © Chris Burkard
  • Photo de la cascade Múlafossur sur les îles Féroé.

    C’est grâce à ce genre de photos que le site de Múlafossur est devenu la principale attraction des îles Féroé.

    Photo © Chris Burkard
  • Gletscherfluesse von oben.

    Dans l’album photo «At Glacier’s End», Burkard met en scène des rivières glaciaires vues de très haut à la manière d’œuvres d’art.

    Photo © Chris Burkard
  • Jemand beim surfen, im Hintergrund grosse Felsen.

    En mission pour Patagonia : Dan Malloy place un snap parfait sous la lèvre d’une vague au Japon.

    Photo © Chris Burkard
  • Fotograf Chris Burkard trägt sein Fahrrad durch einen Fluss.

    Encore et toujours l’Islande – ici lors d’un trip de bikepacking dans les fjords de l’ouest en août 2021.

    Photo © Even Ruderman
  • Jemand beim surfen in Chile.

    Cette photo prise au Chili a permis à Chris Burkard de percer sur la scène internationale.

    Photo © Chris Burkard

La Californie est pourtant loin d’être une mauvaise région pour les photographes de surf, mais ce sont plutôt les régions froides qui t’ont attiré?
Les trips de surf classiques en eaux chaudes me conduisaient toujours aux mêmes endroits et aux mêmes vagues. Je devais transmettre dans mes photos un enthousiasme qui ne m’animait plus. Je n’avais pas la motivation nécessaire pour livrer le meilleur de moi-même dans mon travail. Je voulais plutôt expérimenter quelque chose de brut, quelque chose qui soit authentique. J’ai donc commencé à explorer des régions de surf plus froides, parce qu’elles promettaient plus d’aventure et que les choses n’étaient pas aussi prévisibles.

En 2010, tu as remporté le prix lllume, le plus important concours de photos de sports d’action, avec une photo prise lors d’un surf trip au Chili. Est-ce que tu as pressenti que cette photo allait te faire percer?
J’ai senti que j’avais capturé un moment particulier, mais je ne me doutais pas de l’impact que cela aurait sur ma carrière. C’est une photo unique, mais ce n’était pas non plus une photo que j’avais planifiée dans ma tête des mois auparavant et que j’ai ensuite réalisée. Ce n’est que longtemps après le concours qu’elle a réellement pris de l’importance pour moi, car elle a résisté à l’épreuve du temps.

Tu as été l’un des premiers à rencontrer un grand succès sur les réseaux sociaux ...
Je n’ai pas tout à fait été le premier, mais Instagram a été d’une importance capitale pour moi. C’est ma femme qui m’a dit que je devais essayer. Parce que quand je revenais de voyage, j’avais toutes ces photos, mais j’avais toujours l’impression qu’en fin de compte, c’était quelqu’un d’autre qui racontait mes histoires. J’ai donc commencé à partager mes expériences avec les gens sur cette plateforme.

Aujourd’hui, tu as 3,8 millions de followers sur Instagram. Est-ce que cela a changé ton travail?
Pour les projets touristiques, il ne s’agit souvent que de publicité sur les réseaux sociaux – ce ne sont pas que mes photos qui les intéressent, mais aussi ma portée. C’est un sentiment parfois assez étrange. Mais j’aime partager mes expériences et raconter ainsi des histoires qui sont authentiques et prises sur le vif. J’ai presque l’impression d’être à la tête de mon propre magazine. Dieu merci, je n’ai pas besoin de faire semblant. Cela doit être extrêmement fatigant de mettre en scène sa vie spécialement pour Instagram.

Est-ce que des gens te reconnaissent dans la rue ou à l’aéroport?
Ça dépend de l’endroit où je me rends. Je ne me considère absolument pas comme quelqu’un de célèbre. Mais c’est toujours un sentiment spécial quand je suis quelque part et que quelqu’un me dit: «Je suis allé en Islande parce que j’ai vu tes photos». Je suis reconnaissant de pouvoir inspirer les gens à faire leurs propres expériences.

Certains endroits que tu as aussi rendus populaires avec tes photos sont maintenant complètement envahis. Il y a aujourd’hui débat sur la question de savoir s’il faut divulguer les endroits précis où les photos ont été prises. Quel est ton avis à ce sujet?
Je suis convaincu que chacun d’entre nous a, à un moment ou à un autre, été amené par quelqu’un à découvrir un lieu ou un endroit particulier – grâce à des amis, par exemple. Et c’est aussi important, car nous devons expérimenter les lieux avant de vouloir les protéger. La portée des réseaux sociaux a bien sûr une tout autre influence. Mais les masses se rassemblent principalement dans des endroits où il est très facile de se rendre. Dès que l’on s’éloigne de 20 ou 30 minutes, on se retrouve toujours seul. Je pense que le principal problème des réseaux sociaux réside dans le fait qu’ils privent les gens de la joie de découvrir de tels endroits par eux-mêmes.

Comment es-tu finalement passé du monde du surf à la scène outdoor?
Je photographiais des surfeurs pour Patagonia et la marque m’a demandé si cela m’intéressait de photographier dans mon style d’autres sports comme l’escalade, le trail running ou le ski. L’idée m’a plu et j’ai appris à grimper et à skier, enfin à 80%.

Et quels aspects de la photographie de surf as-tu pu transposer à la photographie outdoor?
Ce n’était pas un si grand changement pour moi. Après tout, j’ai toujours été un photographe outdoor. C’est un peu comme si je m’étais réfugié derrière la photographie de surf pour dissimuler mon envie de capturer de superbes paysages. Grâce à l’escalade et au ski, je me suis retrouvé dans des endroits encore plus sauvages que ce que j’aurais pu rêver.

«Les foules se rassemblent principalement à des endroits très faciles d’accès.»

Quand as-tu découvert ton amour pour l’Islande?
La première fois que je m’y suis rendu, c’était pour le compte du «Men’s Journal», pour illustrer un article sur un surfeur. Le pays offrait un contraste saisissant avec tout ce que je connaissais. La recherche de bonnes vagues combinée à cette nature brute a fait de ce voyage une véritable aventure et a conforté mon amour pour ce pays et cette façon de voyager. Désormais, je ne cesse d’y revenir.

Combien de fois y es-tu allé?
Je dirais que j’ai effectué une cinquantaine de voyages en Islande. En général, je m’y rends deux fois par an, et ce depuis presque 15 ans.

Tes photos prises sur place ont déjà fait découvrir l’Islande à de nombreuses personnes. As-tu déjà reçu une carte de remerciement de l’office du tourisme islandais?
J’ai la chance de pouvoir travailler avec de nombreuses entreprises islandaises. Et je pense qu’ils apprécient ce que j’ai fait pour le pays et le tourisme. Malheureusement, je ne suis pas encore citoyen d’honneur. (rires) Mais j’espère qu’un jour, je pourrai appeler l’Islande mon chez-moi. Pour l’instant, j’y ai un appartement en location, une maison, une voiture et un numéro de sécurité sociale. Je suis donc sur la bonne voie.

Dernièrement, tu as fait plusieurs randonnées sauvages à vélo en Islande, même en hiver. Comment en es-tu arrivé là?
Au cours des six dernières années, je suis tombé amoureux du bikepacking. Je trouve ça génial de pouvoir redécouvrir ce pays. J’ai traversé l’Islande plusieurs fois, y compris en fatbike en hiver. J’ai aussi fait le tour de l’Islande à vélo, dans les fjords de l’ouest et sur la côte est. Le légendaire photographe du «National Geographic», Galen Rowell, disait toujours que la photographie devait être un moyen de te pousser à être un participant actif, à ne pas te cantonner au rôle de simple spectateur.

Comment concilies-tu tous ces voyages avec ta vie de famille?
Il y a des années où ça joue mieux que d’autres. Mais si tu ne parviens pas à trouver un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée, quel est l’intérêt? Si j’étais le photographe le plus talentueux qui soit mais que je perdais de vue ma famille, cela serait quand même un échec. Cela demande beaucoup de communication et une grande clarté sur ce que l’on veut et ce à quoi on aspire. Cela m’a toujours réussi lorsque j’ai discuté ouvertement de mes espoirs et de mes rêves avec ma femme. Et ce, bien que nous n’utilisions jamais le mot «équilibre» à la maison, car nous ne pensons pas qu’il existe vraiment un équilibre dans la vie. Et pour cause, la vie est une succession rythmée de hauts et de bas avec lesquels il faut savoir composer.

Au moment où nous discutons, tu es justement de nouveau en Islande – mais pour la première fois accompagné de ta famille ...
Ma femme est déjà venue quatre ou cinq fois. Mais ça a toujours été mon rêve d’amener aussi mes enfants ici. C’est aujourd’hui le bon moment puisqu’ils sont assez grands pour vraiment saisir tout ce que le pays a à offrir. C’est pour moi une très grande satisfaction de pouvoir partager avec eux mes endroits préférés. J’ai quelques jobs à effectuer ici et les garçons doivent aussi suivre l’école à distance.

Désormais, tu tournes également des films et apparais devant la caméra. Est-ce nécessaire pour une grande carrière de photographe?
Je ne crois pas que ce soit nécessaire. Je préfère documenter d’autres personnes et je n’aime pas vraiment me retrouver au premier plan. Mais en fin de compte, je veux raconter des histoires et je cherche toujours la meilleure forme de narration possible. Si une histoire signifie quelque chose pour moi, je deviens automatiquement une partie du récit. C’est ce qui m’a amené à faire des films et à écrire des livres, et je donne aussi des conférences.

Quelle est la part de ta photographie qui est planifiée et quelle est la part qui est spontanée?
Ça dépend. S’il s’agit d’un spot publicitaire avec des centaines de milliers de dollars en jeu et 70 personnes sur le plateau, alors j’essaie de planifier très précisément. Mais j’adore quand tout se passe sur le moment. C’est génial pour les articles de magazine, les expéditions ou les films documentaires. On documente simplement les choses comme elles viennent. C’est pour moi la façon la plus exaltante de travailler.

Combien d’appareils photo et de drones as-tu cassés?
Un bon paquet. Ma philosophie est la suivante: «Tools, not jewels» – ce sont des outils et non des bijoux. Une fois, au Chili, nous sommes allés en mer sur une petite embarcation. Le conducteur du bateau était complètement ivre et a sous-estimé une vague. Nous n’avons pas chaviré, mais tout était complètement trempé. J’ai vidé l’eau salée de mon appareil photo et de mes objectifs. Seules les cartes mémoire ont résisté. Je me suis dit qu’à présent, plus aucune compagnie ne voudrait m’assurer.

Ta vision de la photographie a-t-elle changé au fil des années?
Par le passé, je m’intéressais surtout à la technique de l’appareil photo. Plus je vieillis, moins le choix de l’appareil photo m’intéresse. Et parfois, je n’ai même pas besoin d’appareil photo. Depuis que je m’exprime aussi par l’écriture et le langage, je me sens moins souvent frustré sur le plan créatif.

Dans ton livre, tu expliques qu’au début, tu n’arrivais pas à profiter du moment présent. Est-ce toujours le cas?
Souvent, mon esprit n’était pas là où se trouvaient mes pieds, pour ainsi dire. Je me projetais toujours dans ce qui allait suivre et je ne prenais jamais le temps de simplement profiter et de respirer. J’y arrive mieux maintenant. Par exemple, je montre aujourd’hui l’Islande à mes fils et je me réjouis simplement de redécouvrir le pays en famille.

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